2015-2016 : Aux frontières de l’urgence. Enquête collective avec le Samusocial de Paris

Corentin DURAND, doctorant contractuel à l’EHESS

Erwan LE MENER, chercheur à l’Observatoire du Samusocial de Paris.

SamusocialInitiée dans le cadre de l’Ouvroir de sciences sociales potentielles de l’EHESS, cette enquête sera réalisée en partenariat avec le Samusocial de Paris. En mettant à distance le modèle de l’expertise, nous tenterons de réfléchir à la manière dont sciences sociales et acteurs de terrain peuvent co-construire des projets de recherche alliant pertinence sociale et intérêt scientifique.

Dans le cadre de sa mission de lutte contre la grande exclusion, le Samusocial de Paris accueille notamment des sans-domiciles dans des centres d’hébergement et des accueils de jour. Néanmoins, en cas de comportements jugés suffisamment graves, ces structures peuvent prononcer des mesures dites d’ « éloignement » à l’encontre de personnes accueillies. Ces exclusions sont valables pour des périodes allant d’une journée à quelques semaines, exceptionnellement pour une durée indéfinie. L’enquête proposée porte sur ces mesures d’éloignement : quelles logiques conduisent à de telles décisions ? comment sont-elles justifiées ? comment sont-elles vécues par les personnels, les personnes hébergées et les personnes éloignées ? A travers ces questions, il s’agit d’interroger l’urgence sociale par ses frontières.

L’enquête peut accueillir entre 15 et 20 participants, répartis en trois groupes. Encadrés par les enseignants, les groupes centreront chacun leur recherche sur un centre d’hébergement d’urgence ou un accueil de jour particulier. L’enquête permettra aux étudiants de se familiariser avec des méthodes diverses : observation, entretiens, analyse de contenu et statistiques descriptives. En effet, chaque mesure d’éloignement donne lieu à la rédaction d’une décision motivée. L’un des objectifs de l’enquête est de construire un dispositif de codage de ces motivations et d’en proposer une analyse. Chaque groupe réalisera par ailleurs des entretiens et des observations avec des professionnels et, si possible, des personnes hébergées d’un centre ou accueil de jour du Samusocial.

Les premières séances seront consacrées à la définition de la problématique, la préparation de l’enquête de terrain et la construction du dispositif de codage. La collecte des données se fera sur une semaine complète. Les séances suivantes seront consacrées à l’analyse des données qualitatives et quantitatives, puis au travail d’écriture. Enfin, une séance de restitution sera organisée afin de discuter des observations et des résultats avec les partenaires du Samusocial de Paris.

Guillaume Di Vitantonio – Le temps dans les ateliers et chantiers d’insertion

Partenaires du projet : Halage, études ET chantiers Ile-de-France, Mode Estime 

PHARESCes trois associations sont porteuses d’ateliers et chantiers d’insertion (ACI) en Ile-de-France,  dans divers secteurs tels que les espaces verts, la peinture, la mécanique cycle, le maraichage bio et la couture.

Elles sont basées au sein du Pôle d’Hospitalité aux Activités à Rayonnement Ecologique et Solidaire (PHARES) à l’Ile Saint-Denis. Ce pôle regroupe une douzaine de structures de l’économie sociale et solidaire (ESS) engagées autour de thématiques comme le développement local, l’insertion professionnelle et l’amélioration de l’environnement pour les habitants.

Biographie de l’étudiant : Guillaume Di Vitantonio

Guillaume Di Vitantonio est diplômé de l’ESSEC BBA et prépare un master en sociologie générale à l’EHESS. Ses recherches portent principalement sur la question du temps en sociologie et l’Insertion par l’Activité Economique.

Projet de recherche : Le temps dans les ateliers et chantiers d’insertion

La recherche engagée en partenariat avec Halage, études ET chantiers et Mode Estime porte sur la question du temps dans les ateliers et chantiers d’insertion. Elle s’attache en particulier à montrer comment on peut déceler dans la construction d’un temps collectif spécifique à chaque chantier d’insertion, l’expression de la rencontre entre différentes attentes, individuelles et collectives, vis-à-vis de ce temps collectif, et plus généralement entre différentes conceptions de l’insertion par l’activité économique. D’un point de vue méthodologique, la recherche croise principalement trois techniques : l’observation participante, l’entretien semi-directif et l’utilisation d’archives.

Camilo León Quijano – Narrations ethno-photographiques des espaces sexués à Sarcelles

Partenaires du projet : Canal Marches (www.canalmarches.org) et Du Côté des Femmes (http://www.ducotedesfemmes.asso.fr/)

Canal Marches est une association créée par des professionnel(e)s de l’audiovisuel, des chômeurs et précaires, des militant(e)s des mouvements sociaux. Elle a pour but de contribuer à l’expression, à la visibilité des “Sans voix” et de leurs résistances, et plus Logolargement, des personnes issues des milieux populaires ; valoriser leur créativité, notamment, mais pas exclusivement, par l’appropriation de l’outil vidéo.

 Du Côté des Femmes. Créée en Mai 1984, “La Maison des Femmes”, ouverte à toutes les Femmes, à Cergy,  projet pilote est un centre d’accueil, d’information, de formation, de suivi social et d’hébergement qui prend en compte l’ensemble des préoccupations des Femmes. L’Association Du Côté Des Femmes s’est donnée comme objectif de sensibiliser la population et de dénoncer  les violences  et les oppressions  spécifiques que subissent les femme

Biographie de l’étudiant : Camilo León Quijano

Doctorant contractuel en sociologie à l’EHESS (LAHIC-IIAC/CEMS-IMM) Camilo León Quijano s’intéresse à l’ethnographie visuelle, principalement aux usages des outils (audio)visuels dans le processus d’enquête ethnographique en sociologie urbaine et en sociologie du genre.

A l’EHESS, il a réalisé soutenu un mémoire de Master sur le processus de construction des rapports de genre au sein d’une enquête comparative entre Sarcelles et Medellín (Colombie). Camilo León Quijano a commencé ses études en Colombie (U. Nacional). Il a par la suite étudié en Argentine (U. Buenos Aires), Italie (U. di Bologna) et France (Sciences Po Bordeaux ; IHEAL-Sorbonne Nouvelle ; EHESS).

Il est également président de l’association de recherche visuelle Last Focus Visual Research Network, qui a organisé le colloque international LFVRN 2015 « Ethnographie visuelle : outils, archives et méthodes d’enquête » (www.lastfocus.com) dont il était le directeur. Actuellement il mène une recherche sur le genre et les pratiques urbaines des femmes et des hommes à Sarcelles en utilisant la photographie comme outil d’enquête.

Projet de recherche : Narrations ethno-photographiques des espaces sexués à Sarcelles

Le projet Narrations ethno-photographiques est né au mois de décembre 2014, suite à des échanges réalisés avec les membres de Canal Marches. L’objectif était de pouvoir « fabriquer » un projet participatif de recherche visuelle sur le terrain avec la participation de femmes de quartiers populaires d’Ile-de-France. L’idée de base était de découvrir les comportements spatiaux des femmes dans des quartiers marginaux et l’articulation qui existe entre les comportements, les représentations sociales et les discours qui sont portés par les femmes qui habitent ces espaces.

Canal Marches et DCF travaillent ensemble dans le projet d’Université Populaire Audiovisuelle (UPOPA 6) et ont proposé la mise en place d’ateliers ethno-photographiques dans ce cadre. Ceux-ci ont pris la forme d’un espace de rencontre régulier (une fois chaque deux semaines environ) pour  femmes qui fréquentent l’Espace de Femmes. Les ateliers ont été organisés de la manière suivante : une discussions thématique collective, puis une formation photographique de base, puis une pratique photographique urbaine collective, enfin un exercice de cartographie visuelle de genre.

Les ateliers à Sarcelles et dans le cadre de l’UPOPA 6 continuent.  Une première exposition photo est prévue à Cergy au mois de mars de 2015. L’idée est de pouvoir continuer ce travail d’appropriation de l’espace urbain par l’image, notamment avec une exposition itinérante qu’actuellement est en cours d’organisation à Sarcelles.

Audrey Marcillat – Le genre dans la prise en charge des personnes sans abri

Partenaire du projet : Aurore (http://aurore.asso.fr/)

Créée en 1871, l’association héberge, soigne et accompagne chaque année près de 13 000 personnes en situation de précarité ou d’exclusion vers une insertion sociale et/ou professionnelle. Elle expérimente également de nouvelles formes de prises en charge pour s’adapter à l’évolution des phénomènes de précarité et d’exclusion.

Aurore emploie plus de 1000 personnes et anime un réseau de bénévoles. L’association s’est développée ces 10 dernières années pour proposer aujourd’hui 103 établissements et plusieurs résidences dans 10 départements. Aurore travaille en partenariat avec l’Etat et les collectivités locales, régions, départements et communes.

Biographie de l’étudiante : Audrey Marcillat

Audrey Marcillat

Doctorante en sociologie à École des Hautes Études en Sciences Sociales, Audrey Marcillat est rattachée à l’Institut de recherche interdisciplinaire sur les enjeux sociaux (Iris). Sa thèse est financée par le DIM/GID – Institut Émilie du Châtelet. C’est dans la continuité d’une recherche de Master portant sur les femmes sans abri parisiennes, qui a fait l’objet d’une publication en 2014 au sein des Dossiers d’étude de la CNAF, qu’Audrey Marcillat poursuit une recherche sur les femmes et les hommes sans-abri en Île-de-France. Ses recherches croisent donc les thématiques du sans-abrisme et du genre, en portant une attention particulière aux enjeux éthiques de la recherche sur les populations vulnérables. C’est dans ce cadre qu’elle contacte l’Ouscipo en 2014 pour réaliser une recherche collaborative avec l’association Aurore.

Projet de recherche

L’objectif de cette collaboration est de travailler avec l’association Aurore à la réalisation d’une recherche portant sur la diversification des profils des bénéficiaires de son action en même temps que l’approfondissement de la question du genre dans la prise en charge des personnes sans abri. L’action d’Aurore, à travers le pôle urgence comme à travers le pôle hébergement, traverse les problématiques de la recherche puisqu’elle est constamment au contact de personnes précaires et sans-domicile. En même temps, l’apport est également du côté des prises en charge, puisqu’une réflexion menée sur les populations accueillies permet en retour de questionner le travail et les modes d’accompagnement auprès des sans-abri comme des précaires. C’est donc un retour réflexif indispensable qui permet de nourrir les questionnements mutuels de la recherche comme du secteur associatif.

Page personnelle : http://iris.ehess.fr/index.php?2259

Contact : audrey.marcillat@ehess.fr

Erwin Flaureau – Formes d’engagement dans les maraudes

Partenaire du projet : Aurore (http://aurore.asso.fr/)

Logo AuroreCréée en 1871, l’association héberge, soigne et accompagne chaque année près de 13 000 personnes en situation de précarité ou d’exclusion vers une insertion sociale et/ou professionnelle. Elle expérimente également de nouvelles formes de prises en charge pour s’adapter à l’évolution des phénomènes de précarité et d’exclusion.

Aurore emploie plus de 1000 personnes et anime un réseau de bénévoles. L’association s’est développée ces 10 dernières années pour proposer aujourd’hui 103 établissements et plusieurs résidences dans 10 départements. Aurore travaille en partenariat avec l’Etat et les collectivités locales, régions, départements et communes.

Organisées autour de trois missions, hébergement, soin et insertion, ses activités sont multiples : maraudes, hébergement, centres spécialisés dans l’accueil et l’hébergement de personnes rencontrant des problèmes d’addiction, activités de réinsertion professionnelle à destination de personnes en rupture d’emploi ou handicapées, hébergement de personnes en souffrance psychique…

Biographie de l’étudiant : Erwin Flaureau

Titulaire d’une licence de sociologie obtenue à l’université de Limoges en 2014, Erwin Flaureau est actuellement en première année de master à l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales, mention sociologie générale.

Projet de recherche

Au cours de sa formation, il s’est particulièrement intéressé aux différentes formes de forte précarité, notamment au travers du cas des « personnes à la rue ». Cela l’a conduit à effectuer une première enquête concernant la prise en charge « des gens de la rue » par l’institution psychiatrique, au travers du cas du pôle addictologie de l’hôpital Esquirol de Limoges. Erwin Flaureau s’est ensuite intéressé aux luttes pour l’occupation de l’espace de mendicité, qui voyaient s’opposer différents groupes de « gens de la rue » de la ville de Limoges. Dans la continuité de cette enquête, il a effectué une étude sur les formes d’occupation de l’espace public au travers du cas des campements des sans-abri de Limoges et de Paris.

Dans le cadre de son master 2, Erwin Flaureau effectue une enquête qui s’inscrit dans le cadre d’un partenariat, porté par l’Ouvroir de sciences sociales potentielles, avec l’association « Aurore ». Celle-ci cherche en effet à parfaire ses connaissances sur son action auprès d’une population fortement touchée par la précarité : « les gens de la rue ». En particulier, c’est sur la pratique des maraudes que se centre cette recherche. Selon la définition des acteurs de l’association, « cette activité consistant à « aller vers les personnes à la rue » constitue une forme singulière d’intervention sociale, qui mérite d’être décrite et interrogée. »

Il existe de nombreuses associations bénévoles ou professionnelles qui effectuent des maraudes dans les différents arrondissements de Paris. Cette forme singulière d’intervention sociale n’est cependant pas homogène et les structures mettent en place des approches différentes. Les unes vont par exemple distribuer des denrées alimentaires, d’autres vont promulguer des soins et certaines vont à la rencontre des « gens de la rue » délestées de tout objet dans l’unique but de tisser le lien social. Cet éclatement des approches se retrouve également au sein même des différentes associations. Les maraudeurs, loin de partager une vision unique de la pratique, entretiennent différentes visions de ce qu’est l’assistance ainsi que de leur action auprès des sans abri. On cherchera dès lors, par une enquête sociologique effectuée auprès de trois structures différentes, à comprendre comment se fait-il que sous une appellation et une définition unique, les maraudes donnent lieu à des formes d’assistance différentes ?