2014 « La variabilité culturelle en question : la monnaie antique grecque entre technique et usages »

 

Atelier : « La variabilité culturelle en question : la monnaie antique grecque entre technique et usages »
Jeudi 11 décembre 2014, 190-198 Avenue de France, 75013 Paris

Dans le cadre du projet ANR Sourva (‘Aux sources de la variation culturelle’), le LIAS (composante de l’Institut Marcel Mauss – CNRS-EHESS, UMR 8178) organise un atelier ayant pour thème la nature et la diversité des usages de la monnaie, en prenant pour cas paradigmatique l’exemple de la Grèce ancienne.
Cet atelier vise à faire se rencontrer des spécialistes de disciplines variées qui ont, pour certains, l’exemple envisagé pour terrain d’étude et pour d’autres, un intérêt pour la question anthropologique de la variabilité culturelle.


1. La notion de variabilité culturelle

Contrairement à la notion de diversité culturelle qui suppose une hétérogénéité intrinsèque des formes culturelles (langues, techniques, organisations sociales, styles esthétiques, etc.) sans qu’une raison à cette hétérogénéité soit avancée, la notion de variabilité culturelle assigne à l’hétérogénéité une raison en la définissant comme l’ensemble des variations que peut prendre une forme culturelle tout en continuant à être reconnaissable. Les variations définissent dès lors entre elles une relation de voisinage fondée sur une norme commune. Les écarts par rapport à la norme peuvent alors être interprétés selon deux modalités, selon que l’on restreint ou pas la relation de voisinage en question. Dans le cas où on limite la portée de cette relation de voisinage, la forme culturelle est considérée comme fixe et l’écart est interprété comme une déviation par rapport à la forme identifiée directement à sa norme ; dans le second, c’est au contraire grâce aux écarts conçus comme des variantes dans une relation de voisinage que la forme finit par devenir perceptible. Accorder ou pas un rôle constitutif à la variation dans la reconnaissance de l’identité propre à une forme culturelle revient ainsi à envisager la norme comme susceptible de faire ou non une place à la variation.
Trois cas sont alors envisageables, que la tradition anthropologique rapporte aux paradigmes de la « diffusion », de la « structure » et de la « transaction ».

  • Dans le cas diffusionniste, les variations culturelles affectant une forme sont rapportées à une simple contingence historique s’opposant à ce qui la rend invariante. Une forme culturelle ressemble alors à un matériau inanimé, susceptible de se diffuser à travers les sociétés à partir d’un point d’origine et par rapport à laquelle toute variation dans l’espace et dans le temps finit par dégrader la relation de voisinage fondée sur la norme commune. La variabilité est alors conçue sur le mode de l’« influence » d’un groupe social sur un autre qui est susceptible d’« imiter » avec plus ou moins de « fidélité » la forme en question, selon que le groupe social imitant est proche de la source de la forme innovante.
  • Dans le cas structuraliste, les variations d’une même forme apparaissent comme significatives par opposition les unes aux autres : une variation est alors conçue sur le mode de la « variante » qui s’intègre à un système dont le sens possède une pertinence spatiale et temporelle déterminée mais qui ne possède pas en lui-même les raisons de sa variabilité. Les raisons de la variabilité restent alors hors du domaine de ses principes méthodologiques.
  • Dans le cas transactionnel, ce sont précisément les raisons de la variabilité qui sont au cœur du modèle. Une forme culturelle doit alors être conçue comme le résultat d’une double contrainte définissant le périmètre dans lequel elle reste reconnaissable : il faut d’une part que l’expression propre de la forme culturelle soit faite en conformité à la norme pour que la forme puisse être publiquement reconnue comme telle ; il faut d’autre part que l’expression de la forme culturelle soit l’occasion de se démarquer par rapport à la norme en produisant un écart pour que l’expression apparaisse comme un événement innovant porteur de sens. Cet équilibre instable introduit une variabilité intrinsèque des formes culturelles dont la poursuite constitue le moteur même  de la vie sociale.

2. L’atelier

Son but : il vise à clarifier la nature et le rôle que peut jouer la notion de variabilité culturelle au cœur de la vie sociale en explorant le cas de la monnaie en Grèce ancienne, de la  technique de sa fabrication à la diversification progressive de ses usages.

Ses participants : les membres du LIAS ne sont pas des spécialistes de la question monétaire et leur terrain d’étude n’est pas la monnaie grecque antique mais ils souhaitent confronter leurs recherches anthropologiques et sémiotiques avec des travaux portant sur ce cas qui leur semble permettre de cerner la notion de variabilité culturelle de façon précise.
La rencontre vise donc à la fois à faire varier les points de vue sur un même objet tout comme à poser aux spécialistes du domaine des questions d’ordre anthropologique et sémiotique qui pourraient se révéler de portée générale.

Programme

Matinée : 10h – 13h, salle 015 (RdC)

Introduction par Jean Lassègue (CNRS)

« La monnaie comme objet technique »
Florian Téreygeol (CNRS)

« La naissance de la monnaie grecque ou comment dire la vérité du monde social »
Christophe Pébarthe (université de Bordeaux 3)

Après-midi : 15h – 17h, salle l’IRIS (5ème étage)

« La monnaie grecque, le signe et la forme »
Frédérique Duyrat (Cabinet des médailles)

« Femmes, échanges, monnaies en Occident »
Emmanuel Désveaux  (EHESS)