Séminaire « Systèmes complexes en sciences sociales », année 2011/2012

Retour à l’année en cours


  • Vendredi 20 juillet 2012 à 14 h, EHESS 105 bd Raspail 75006 Paris, salle 1

Pour cette séance (supplémentaire et dernière de l’année 2011-2012), nous accueillons J. Roberto Iglesias, invité au CAMS à l’EHESS dans le cadre d’un projet financé par le CAPES-COFECUB.

José Roberto Iglesias
UFRGS, Porto Alegre, Brasil
Diffusion d’innovations : rôle de l’influence sociale
Lorsque la totalité du stock d’un nouveau produit est rapidement vendu, on a l’impression qu’une nouvelle technologie se répend très  facilement. Mais quels sont les facteurs qui déterminent l’adoption par la société d’une nouvelle technologie ? La diffusion de la technologie est un  problème ancien. Une approche classique est celle d’Everett Rogers [1] et, selon lui, la distribution des adoptions d’une nouveauté dans le temps suis une loi gaussienne. Nous nous proposons de simuler un modèle simple [2] pour l’adoption d’une innovation qui dépend principalement de trois éléments : l’attrait pour la nouveauté, l’inertie ou la résistance à l’adopter, et  l’interaction avec d’autres agents. Les interactions sociales sont prises en compte de deux façons : par l’imitation et par la différenciation, c’est à dire, certains agents seront enclins à adopter une innovation si beaucoup d’autres le font, mais d’autres vont agir en direction opposée, en essayant de se distinguer du troupeau. Nous discutons les conditions pour lesquelles une nouvelle technologie peut être totalement ou partiellement adoptée. D’un autre côté nous regardons la concentration critique d’agents anti-innovation qui peut bloquer l’adoption d’un nouveau produit. Nous montrons que les résultats du modèle  sont en bon accord qualitatif avec des données empiriques sur l’adoption d’innovations.
[1] EM Rogers, « Diffusion of Innovations », 5è édition, Free Press (2003)
[2] S. Gonçalves, M.F. Laguna and J.R. Iglesias, Eur. Phys. J. B  85 6 (2012) 192


  • Vendredi 8 juin à 14h, EHESS 105 bd Raspail 75006 Paris, salle 1

Juliette Stehlé
Centre de Physique Théorique (CPT), Marseille
Homophilie de genre dans une école primaire : une étude sociométrique utilisant la détection des interactions face à face avec des badges RFID
Nous analysons les interactions face à face entre enfants (entre 6 et 12 ans) dans une école primaire française grâce à la collecte deux jours durant d’informations sur les interactions par des badges RFID (sociopatterns.org). En particulier, l’analyse de ces interactions mises en relation avec le genre des enfants permet d’étudier statistiquement l’homophilie de genre. Pour les liens forts (c’est-à-dire les paires d’enfants qui ont interagit plus longtemps qu’une durée seuil), la préférence pour les enfants du même sexe est statistiquement significative et tend à augmenter avec l’âge. En revanche pour les liens faibles, l’homophilie est négativement corrélée avec l’âge pour les filles alors qu’elle l’est positivement pour les garçons. Cette évolution différente pour les liens forts et faibles donne une vision plus nuancée de l’homophilie de genre.


  • Vendredi 1er juin à 15h45, 175, rue du Chevaleret 75013 Paris, salle 0D04 (heure et lieu inhabituels)

Séance commune avec le groupe de travail  « Humaniste » organisé par Simona Mancini (MAPMO, Orléans), Laurent Boudin  et Olivier Guéant (LJLL, UPMC)

Adrien Blanchet
GREMAQ, Toulouse
Cournot-Nash equilibria and optimal transport
For a class of non-atomic games, we prove, by optimal transport techniques, various existence and uniqueness results and give a variational characterization for Cournot-Nash equilibria. For a wide class of payoffs, minimizers of some cost are Cournot-Nash equilibria. This cost is not convex in the usual sense in general but it turns out to have hidden strict convexity properties in many relevant cases.
Les exposés de ce groupe de travail sont ouverts aux non spécialistes, car une bonne partie de la présentation concerne la description du problème abordé.
http://www.ljll.math.upmc.fr/groupes/gth/


  • Vendredi 13 avril 2012, 15h30, Université UPMC, campus de Jussieu, salle 15.25.321.

À titre exceptionnel ce séminaire sera commun avec celui du groupe de travail « Humaniste » (Laboratoire Jacques-Louis-Lions, UPMC, et MAPMO,  Université d’Orléans)

Athanasios Batakis
MAPMO, Université d’Orléans
Une approche probabiliste de la simulation de la croissance des villes
Inspirés d’un article de Andrade & al., nous avons cherché à confronter des modèles de croissance aléatoire (de type « Diffusion-Limited Aggregation ») à la croissance des villes. Nous nous sommes concentrés sur la ville de Montargis en passe de préparer son Shéma de cohérence territorial (SCOT). Nous avons reçu l’appui de la Direction départementale des territoires du Loiret (DDT 45), ce qui nous a permis d’avoir accès à des données complémentaires que l’on a réussi à implanter dans nos simulations. Cette tentative est financée par la région Centre. Collaborateurs: Nga Nguyen, Michel Zinsmeister et J.M Zaninetti, A. Mas (laboratoire de géographie d’Orléans) et K. Serrhini, S. Thibault, D. Andrieu (laboratoire de l’aménagement du territoire de Tours).
De même que le  séminaire du CAMS, les exposés de ce groupe de travail sont aussi ouverts aux non spécialistes, car une bonne partie de la présentation concerne la description du problème abordé.


  • Vendredi 23 mars, 14h – 105 bd Raspail 75006 Paris, salle 1

Stéphane Cordier
Laboratoire MAPMO (Mathématiques- Analyse, Probabilités, Modélisation-Orléans, Université d’Orléans)
Modèles microscopiques et cinétiques des marchés financiers
On présente dans cet exposé une description du comportement d’un marché financier très simplifié  où les agents gèrent un portefeuille en ayant le choix entre placement à taux garantie et un marché d’actions. On dérive une équation de type Boltzmann linéaire dont l’inconnue est la distribution  des biens couplée à une équation donnant le cours de l’action.


  • Vendredi 16 mars, 14h – 105 bd Raspail 75006 Paris, (attention, salle inhabituelle) salle 5

Rida Laraki
Ecole Polytechnique, CNRS
&
Michel Balinski
Ecole Polytechnique, CNRS
Jugement majoritaire : une nouvelle théorie du vote
Le problème fondamental de la théorie du choix social est d’agréger les «opinions» de plusieurs «juges» ou «électeurs» pour arriver à une «opinion» du jury ou de l’électorat. Le modèle traditionnel demande à chaque juge ou électeur de réaliser une «liste de préférence», sur  laquelle il inscrit, en première place, son candidat (ou son alternative) préféré, en seconde place, celui qui vient ensuite, …
Le mode de scrutin à deux tours utilisé en France relève plus d’une tradition que d’une vérité universelle. En Australie ou en Irlande, les électeurs sont obligés de ranger tous les candidats du meilleur au pire (comme dans le modèle traditionnel). Le gagnant est trouvé en suivant une procédure appelée vote alternatif: on élimine (à chaque itération) le candidat ayant le moins de fois été premier, on transfère les voix des électeurs qui le classe premier au candidat suivant sur la liste et on recommence la procédure jusqu’à aboutir à une majorité pour un candidat.
L’étude formelle des modes de scrutins est une tradition Française qui a commencé un peu avant la révolution Française par Condorcet, Laplace et Borda. Condorcet a montré qu’il est possible que la société préfère à la majorité le candidat A à B, B à C et C à A. C’est son célèbre paradoxe. Ignorant cela, Arrow a réintroduit en 1951 le modèle de Borda et Condorcet. Il a montré qu’il n’existe aucun mécanisme qui désigne toujours un gagnant (évite le paradoxe de Condorcet) et où le retrait d’un perdant ne change pas le gagnant (il évite le paradoxe d’Arrow). L’élection présidentielle de 2002 est une parfaite illustration du paradoxe d’Arrow. Le retrait de Jean-Pierre Chévènement ou de Christiane Taubirat aurait pu permettre l’élection de Lionel Jospin.
D’autres théorèmes d’impossibilités ont été établis par la suite, peut être le plus important est-il celui de Gibbard & Satterthwaite. Ce théorème dit qu’il n’existe pas de mode de scrutin où la stratégie dominante de chaque votant consiste à voter sincèrement. L’élection présidentielle de 2007 est une parfaite illustration: en réaction au séisme de 2002, plusieurs électeurs ont voté utile.
D’autres approches, non couvertes par le modèle traditionnelle, existent en pratique. Dans le vin par exemple, un juge doit typiquement juger une dizaine de caractéristiques (goût, couleur, odeur, …), chacune dans l’échelle (Excellent, Très Bon, Bon, Moyen, Médiocre et Mauvais).
Inspiré et motivé par la pratique (vin, patinage, musique, …), le nouveau paradigme, suppose l’existence d’un ingrédient supplémentaire qui permet de mesurer les mérites des candidats: une échelle commune d’évaluations des mérites (comme les T dans Télérama ou les étoiles de Michelin). Nous l’appelons un «langage commun». Par opposition, classer comme dans le modèle d’Arrow et Condorcet est une mesure relative. Le rang d’un candidat change si on rajoute ou supprime un autre.
Cela nous a amené à élaborer une nouvelle théorie du choix social : le jugement-majoritaire. Cette modélisation du problème permet de se débarrasser des impossibilités et incompatibilités de la théorie classique. Nous montrons que le jugement majoritaire est l’unique règle qui évite les paradoxes de Condorcet et d’Arrow et qui résiste le mieux aux diverses manipulations stratégiques.
Le jugement majoritaire a été testé au premier tour de l’élection présidentielle de 2007 dans trois bureaux de vote d’Orsay et dans bien d’autres instances, comme les primaires socialistes en 2011.


  • Vendredi 10 février

    à 14 h :
    François Bourguignon
    Directeur d’études EHESS et Directeur de PSE-Ecole d’économie de Paris
    Dix ans de réflexion sur le thème de l’inégalité : et après ?

à 15h30 :
Yoshiyasu Ono
Fellow, Osaka University
On Persistent Demand Shortages: A Behavioral Approach
We incorporate two sets of behavioral assumptions (fairness concerns for nominal wages and insatiable desire for money) into a dynamic model of a monetary economy to illuminate how these sets of assumptions can generate persistent aggregate demand shortages. We obtain the  condition for persistent unemployment, and that for temporary unemployment, to occur. Policy implications significantly differ between the two cases. A monetary expansion raises private consumption under temporary unemployment but not under persistent nemployment. A fiscal expansion may or may not increase short-run private consumption but crowds out long-run consumption under temporary unemployment. Under persistent unemployment, however, it always increases private consumption.

About Yoshiyasu Ono:
1979 : Doctor of Economics, the University of Tokyo.
1990-1996 & 1999-2010 : Professor, ISER (Institute of Social and Economic Research), Osaka University.
1996-1999 : Professor, Tokyo Institute of Technology
2011-Present : Fellow, Osaka University


  • Vendredi  20 janvier, 13h30-14h30, 105 bd Raspail 75006 Paris, salle 4 (attention, salle non habituelle)

Camille Roth
CAMS, EHESS, Paris
Dynamique des réseaux de transport et dynamique sur les réseaux de transport
Nous présenterons deux études complémentaires des processus dynamiques qui animent et structurent les réseaux de transport urbains.  Ces réseaux définissent en effet à la fois l’organisation des mouvements des individus au sein d’une ville et sont, en retour, définis par la distribution de ces mêmes individus dans l’espace urbain.
La première analyse porte sur le réseau du métro de Londres (1). La seconde concerne l’évolution temporelle des principaux réseaux de métros dans le monde au cours du dernier siècle. Le principal résultat est que ces réseaux tendent à converger vers des formes partageant les mêmes caractéristiques génériques, ceci malgré la grande diversité des conditions économiques et géographiques.

Dynamics on and of subway networks
Subway networks shape, to some extent, the structure of movements of individuals across a city; similarly, they are being partially shaped by the presence of these individuals in the city.  This talk will present two complementary studies describing the dynamic processes which subway networks both host and undergo.
The first analysis focuses on dynamics processes occurring on the subway network of a large city (London) in terms of its commuting patterns.  It uses the large scale, real-time electronic ticketing data from the Oyster Card system, introduced less than a decade ago, to reveal a part of the structure and organization of the city.  More precisely, this study shows that patterns of intraurban movement are strongly heterogeneous in terms of volume, but not in terms of distance travelled, and that there is a polycentric structure composed of large flows organized around a limited number of activity centers. For smaller flows, the pattern of connections becomes richer and more complex and is not strictly hierarchical since it mixes different levels consisting of different orders of magnitude.
The second study investigates the temporal evolution of the major subway networks in the world over the last century.  The main result is that most of these networks tend to converge to a shape which shares some generic features, despite their geographical and economical differences. These features include a core with branches radiating from it to cover about twice the average radial extension of the core.    The core generally includes about 60% of the network stations and exhibits an average degree of order 2.5.  Interestingly, core and branches define two distinct and universal regimes in terms of the number of stations at a given distance from the barycenter.  This result which was difficult to interpret in the framework of fractal geometry finds here a natural explanation.
More broadly, these two types of studies open the way to more integrated analyses of the coevolution between the dynamics on and of subway networks.
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C. Roth, S. M. Kang, M. Batty and M. Barthélemy (2011) « Structure of  Urban Movements: Polycentric Activity and Entangled Hierarchical Flows », PLoS ONE 6(1): e15923 (http://dx.plos.org/10.1371/journal.pone.0015923).


  • Vendredi 9 décembre 2011

Anirban Chakraborti
Laboratoire de Mathématiques Appliquées aux Systèmes, Ecole Centrale Paris, http://fiquant.mas.ecp.fr/chakraboa
Kinetic exchange models in studying socio-economic phenomena
In this talk I will first review a kinetic wealth-exchange model introduced by Angle in 1986 [1] and further developed since then [1,2,3,4]. The main model outcome is the prediction of the wealth distribution in the society. Comparison with empirical data, and the analytical fitting forms for such wealth distributions will be discussed. The micro-economic formulation of such models will be also mentioned [5], which establishes the link between the principles of maximum entropy in physics and utility maximization in economics.
Then I will also briefly review a minimal multi-agent model [6] for the collective dynamics of opinion formation  (based on the similar kinetic exchange dynamics studied in the above context of wealth distribution), and its simple variants and extensions that have been proposed recently by others [7,8]. These models have an intriguing spontaneous symmetry breaking transition to polarized opinion state starting from non-polarized opinion state, and are very simple models to study critical phenomena of statistical physics. We provide mean field estimates for the critical points, which are numerically supported with reasonable accuracy.
[1] J. Angle, Social Forces 65, 293 (1986); J. Math. Sociol. 26, 217 (2002)
[2] E. Bennati, Rivista Internazionale di Scienze Economiche e Commerciali 35, 735 (1988)
[3] A. Chakraborti, B. K. Chakrabarti, Eur. Phys. J. B 17, 167 (2000)
[4] A. Dragulescu, V.M. Yakovenko, Eur. Phys. J. B 17, 723 (2000)
[5] A. S. Chakrabarti, B. K. Chakrabarti, Economics: The Open-Access,
Open-Assessment E-Journal, Vol. 4, 2010-4 (2010)
[6] M. Lallouache, A. S. Chakrabarti, A. Chakraborti & B. K. Chakrabarti, Phys. Rev. E 82, 056112 (2010)
[7] P. Sen, Phys. Rev. E 83, 016108 (2011)
[8] S. Biswas et al J. Phys.: Conf. Ser. 297, 012004 (2011)